lundi 17 février 2014

Zone Touristique Sidi Salem : main basse sur les espaces verts !

Depuis plus de quatre ans, le projet de la zone touristique de Sidi Salem est bloqué à cause de la volonté de l’Agence Foncière Touristique (AFT) d’apporter des modifications au Plan d’Aménagement de Détail (PAD) de la zone, document juridique opposable aux tiers réglementant l’exploitation de la zone.

S’agissant d’un milieu fragile, l’étude d’impacte réalisée sur ces marais et le Ministère de l’Environnement avaient insisté sur la nécessité de maximiser les espaces verts et de limiter les constructions afin de ne pas troubler les équilibres naturels établis.

Cette approche avait permit de préconiser une conception avantageuse pour la Commune de Bizerte et ses habitants et allait faire bénéficier ces derniers d’un espace vert équipé et public de 3 ha de surface et longeant la côte sur près de 250 mètres. Ces espaces pouvaient accueillir des parcs d’attractions, des aquaparcs, des jardins botaniques.. Et sont surtout foncièrement propriété de la Commune de Bizerte.

Néanmoins, cette approche qui privilégie l’humain, la nature et le statut de la Commune, en temps de despotisme nous dirait on, ne semble pas être au gout du capital, des responsables de l’Agence Foncière Touristique et des actuels ténors de la Commune de Bizerte.
Effectivement, suite à la demande des investisseurs qui n’étaient pas satisfaits des 5 ha alloués à la construction de deux hôtels, l’AFT a présenté une nouvelle version de l’aménagement de cette zone à la Commune permettant à ces investisseurs de faire main basse (et c’est le mot !) sur les 3 ha de zones vertes publiques.
Et contrairement à l’avis émis en date du 14 mars 2012 par la délégation spéciale qui a mené la Commune de Bizerte entre le 03 mai 2011 et le 24 juillet 2012 (chose faite après maintes consultations des différents intervenants), l’actuelle équipe municipale s’est exprimée en faveur de cette révision en l’approuvant au conseil municipal. Ceci constitue une violation criarde de l’article 20 du Code de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme qui restreint le changement des espaces verts au niveau des plans d’aménagements aux décrets émanant du ministre chargé de l’environnement et de l’aménagement du territoire.


« (…)Un espace vert ayant acquis cette vocation par l'effet d'un
plan d'aménagement, ne peut la perdre que par décret pris sur
proposition du Ministre chargé de l'Urbanisme, après avis du
Ministre chargé de l'Environnement et de l'aménagement du
territoire. »
Article 20 du Code de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme


Ceci constitue une incapacité institutionnalisée de voir les composantes d'un espace urbain dans sa globalité. En se soumettant ainsi à l’avidité d’investisseurs qui ne seront jamais rassasiés, nous privons nos villes de ce qui pourrait faire d’elles des milieux propices à l’épanouissement et à la création. Si le but est de stimuler la croissance (puisque nous sommes condamnés à parler ce langage), ce n’est pas en faisant de nos espaces de loisirs des ghettos que nous y arriverons.

L’impact écologique sera quant à lui catastrophique et les quartiers environnants risquent d’en être affectés. La conception initiale visait à maintenir ces équilibres fragiles du marais qu’est le site. Confronté à un bétonnage excessif, ce milieu humide gorgé d’eau devra bien évacuer ces eaux quelques part. La nature se doit de réagir lorsque on la bouscule. Dans quel quartier, quelle rue, quel établissement verra t on ces eaux jaillir ?!

Il ne s’agit guère ici d’exprimer des orientations idéologiques écologistes, mais dans le monde où nous vivons, où l’être humain et l’équilibre naturel jusque là maintenu, sont les derniers soucis des décideurs, il ne serait pas de trop d’appeler la société civile de jouer son rôle et d’arraisonner une équipe municipale qui, non seulement d’être insensible à tout ce qui a été avancé précédemment, se permet même de faire fi des procédures.   



J’étais personnellement convaincu que l’aspect mercantile du projet de la marina et ses impacts écologiques, paysagers et sociaux étaient une caricature du despotisme de l’ancien régime (si nous osons prétendre qu’il a changé). Aujourd’hui, et en voyant ces crimes se reproduire, je me dis que oui ! On peut aller plus loin en matière de médiocrité !     



mercredi 12 février 2014

Municipalité de Bizerte : L’empoisonnement comme réforme

Je crois que les 165 milles habitants du périmètre communal de Bizerte sont d’accord sur le fait que la structure actuelle de la Municipalité de Bizerte est loin de pouvoir relever les défis lancés à la ville, ni de pouvoir répondre aux aspirations de ses habitants qui portent tant d’amour à leur ville, aussi folklorique soit il. Les soixante années de despotisme n’ont pas été sans effets sur ces structures dont le rôle dans la construction d’une démocratie tant espérée sera primordial vue leur proximité du citoyen et du fait qu’elles seront l’outil qui permettra à ce dernier de participer effectivement à la gouvernance.

Le cas de la Municipalité de Bizerte est fort caractéristique. Une extension urbaine non maitrisée, des quartiers historiques en perpétuelle destruction et où les démolitions sont quasi-quotidiennes, une infrastructure routière précaire, 120 tonnes de déchets quotidiens laborieusement collectés… Pour faire face à ces innombrables difficultés, une réforme de l’institution s’imposait !

En guise de butin de sa victoire lors des élections de la Constituante du 23 octobre 2011, le parti islamiste Nahdha s’est attribué le contrôle de la Municipalité de Bizerte. Les beaux discours de réformes (qui certes s’imposaient) ont accompagné cette ascension d’une équipe « pieuse » et « croyante » (qui pour le prouver s’est interdit la présence de toute femme).


Empoisonnement par Al-Bir w Al-Ihsen


Les motivations politiques pour ne pas rater la marche étaient fort présentes. Il fallait à tout prix obtenir un succès rapide, même si ce n’est qu’un leurre, même si ça compromettra l’avenir de l’institution. 
Donc, au lieu de réformer le système de collecte des déchets, au lieu de développer le service d’entretien des chaussées, au lieu de redonner vie à l’action sociale, au lieu de responsabiliser les ouvriers pour qu’ils s’investissent plus… On fera appel à une association caritative satellitaire du parti. C’est à elle qu’on demandera de combler du déficit de collecte de déchets, c’est à elle qu’on confiera certaines taches de bâtiment, c’est à elle qu’on demandera de jouer le rôle social qu’assurait le Municipalité autrefois… et pire que ça, c’est à elle qu’on demandera de motiver certains ouvriers pour qu’ils se dépensent plus au travail… en leur attribuant des primes !
Ce n’est guère une réforme à laquelle on assiste mais plutôt à une dissolution, un démantèlement, un empoisonnement d’une institution vieille de plus de 130 ans et qui, bien qu’on ne soit jamais satisfait de son œuvre, a su se préserver et résister lors des événements de la révolution.
Qu’en adviendra t il de ces services une fois que cette association quittera la scène ? Comment reprendre la tâche ? Comment responsabiliser certains ouvriers qui ont goutté à cette bêtise ?
On avait connu Al-Bir w Al-Ihsen après le 14 janvier 2011 et durant la campagne électorale comme une association caritative à qui les gens faisaient des dons pour aider les plus démunis dans la région. Elle s’efforce aujourd’hui d’éviter l’échec d’un parti qui s’est attribué la légitimité de contrôler une ville qu’il est incapable de gérer, une entreprise qui menace l’avenir d’une institution, une institution fondée en 1884 et qui a survécu à deux guerres mondiales, une bataille de libération et à une dictature, mais qui ne survivra peut être pas à  l’arrogance de certains.


Le clientélisme, sec et béat, des pires années du despotisme, justifie t il à n’importe quel niveau qu’un parti, dont les militants ont eu droit aux effrois du despotisme, exerce de telles pratiques ? En somme, que voulons-nous ? La Tunisie ou le parti Nahdha ?